Sbarro Lola T-70 -1969

La Lola T-70 est un modèle important pour la marque d'Eric Broadley. avec beaucoup de points communs avec la Ford GT40, elle ne pouvait qu'intéresser Franco Sbarro, qui en a extrapolé des versions routières homologuées et immatriculées.

Sbarro type Lola T-70 HH à moteur Porsche 935 turbo de 300 chevaux. Vitesse de pointe 310 km/h.

Lola T-70

En 1956, Eric Broadley fonde Lola, société spécialisée dans la construction de voitures de sport. Très vite, les succès arrivent dans des catégories aussi diverses que les formules sport 1100, Junior, Formule 1... En 1963, Broadley se tourne vers le championnat du monde des constructeurs GT et présente la Lola Mk6. Au même moment, Ford s'est fixé comme objectif une victoire aux 24 Heures du Mans. Mais n'ayant pas de département compétition, la firme américaine cherche un partenaire. Après l'échec des négociations avec Ferrari, Ford se tourne vers Lola, avec qui est signé un contrat de sous-traitance. Eric Broadley travaille donc à la conception de la Ford GT40, en prenant comme base sa propre Lola. Suite à des différents et à une ambiance de travail difficile (Ford ayant tendance à le traiter comme un sous-fifre), Broadley quitte l'équipe et reprend son travail pour construire son propre prototype. Ce dernier, la Lola spyder MkI T70, reprend en grande partie les conceptions techniques de la Ford GT40. La voiture qui nous intéresse aujourd'hui, la Lola T70 MkIII, sera présentée en 1967 au Racing Car Show. Reprenant le châssis des spyders Mk1 et Mk2, elle s'en distingue par sa carrosserie fermée à portes papillon, signée Peter Bohanna et Jim Clarke, de la firme "Specialised Mouldings". En l'absence du soutien d'un grand constructeur, seules des écuries privées l'engageront en courses. De ce fait, malgré son potentiel réel, elle ne put que jouer des seconds rôles. Ce palmarès en demi teinte ne l'empêche pas d'être aujourd'hui très prisée en collection et d'être engagée en courses historiques avec panache face à ses anciennes rivales Ford, Ferrari et Porsche.

Deux Lola T-70 devant les ateliers de Sbarro.

Eric Broadley commande une Lola à Sbarro

Et Sbarro dans cette histoire, me direz-vous ? A l'époque, il était chef mécanicien dans la célèbre écurie Filipinetti, qui engageait en course Ferrari P3 et... Ford GT40. Cette dernière n'avait aucun secret pour notre homme. Il en a d'ailleurs construit des répliques de très grande qualité à partir de pièces d'origine, identiques aux modèles originaux. C'est pourquoi il ne faut pas s'étonner qu'Eric Broadley lui-même demande à Franco Sbarro de construire pour son usage personnel une Lola T70 MkIII adaptée pour la route. Que le concepteur de la T70 en personne s'adresse à Sbarro montre bien les qualités de ce dernier, remarqué lors des quatre années passées chez Filipinetti. Il fallut environ un an pour que Sbarro honore la commande et livre à Broadley une voiture couleur "Green British Racing".

La Sbarro Lola T-70 HH se dévoile.

Sbarro lance une petite série de répliques

Entre temps, l'ACA (l'Atelier de Construction Automobile), la société fondée par Sbarro, reçoit une dizaine de commandes pour une Lola T70 MkIII. Franco Sbarro avait fait l'acquisition de dix châssis originaux, d'une monocoque qui lui servira de modèle pour la carrosserie et d'un stock important de pièces. Au total, il construira neufs répliques officielles.

Certains clients restent fidèles au modèle original, optant pour le moteur Chevrolet V8 équipant la voiture de course. D'autres se sont écartés de l'exactitude technique, préférant l'un un moteur Ferrari V12, l'autre un moteur Porsche 911 turbo 3.3 litres (Sbarro Lola HH) ou un V8 Ford. Hormis la motorisation, toutes les Sbarro Lola partagent le même châssis et la même carrosserie. Ce qui n'est pas sans poser quelques problèmes pour une utilisation routière, dus à l'habitacle étriqué, à la mauvaise visibilité arrière et latérale et à l'accès à bord réservé à des conducteurs souples et pas trop grands ! Une fois lancée, la Sbarro Lola est une voiture difficile à conduire (à piloter devrai-je écrire !) : elle reste avant tout une voiture de compétition, même si Sbarro a habillé l'intérieur de cuir, installé une climatisation et un équipement radio sur certains modèles. Un astucieux coffre à tiroir (comme sur un meuble) permettait de mettre quelques bagages légers.

Démonstration du coffre à tiroir imaginé par Franco Sbarro pour la Lola T-70. Images extraites d'un reportage de la RTS en 1969

Les Sbarro Lola T70 MkIII atteignent un tel degré de fidélité que bien des experts s'y tromperaient (sauf pour les modèles à moteurs Ferrari ou Porsche bien sûr). Données pour plus de 300 km/h, les performances sont spectaculaires. Je doute cependant que les propriétaires aient pu les exploiter pleinement sur route ouverte. Mais comme au temps des gentlemen driver, ils peuvent s'offrir le luxe de rallier le circuit le plus proche au volant de leur voiture, effectuer quelques tours à pleine vitesse puis repartir sereinement par la route. Un luxe que peu de voitures peuvent offrir.

En bref
1- Eric Broadley, le fondateur de Lola, est le premier client de Sbarro pour une.. Lola !
2- Neuf exemplaires produits
2- Plusieurs motorisations possibles : Chevrolet, Ferrari ou Porsche
3- A ce niveau d'exécution, la Lola T-70 de Sbarro est beaucoup plus qu'une simple réplique
Principales sources
1- livre "Franco Sbarro. La mécanique dans le sang. Tome 1"
2- livre "Franco Sbarro / concept cars" de Fabian Sbarro
3- brochure officielle (2 pages recto-verso) présentant la Sbarro type Lola 70